Les bibliothèques à l’aide de la Citizen Science
Petit panorama en 4 points
Par S. Abbou, L. Comé, E. Heintz, A. Kessi
Qu’est-ce que la Citizen Science ?
Phénomène émergeant dans les années 70 aux États-Unis, le concept de sciences citoyennes, sciences participatives ou Citizen Science en anglais, rencontre aujourd’hui un franc succès au point de se voir encadrer de manière quasi professionnelle. Héritage des sociétés savantes, la Citizen Science regroupe projets et programmes menés partout dans le monde grâce à la participation d’amateur·trice·s intéressé·e·s, notamment pour la récolte des données. Il s’agit d’un réel partenariat entre le public et les chercheur·euse·s.
Les projets concernés sont très variés, cependant plus nombreux dans les branches des sciences naturelles. Cela est dû à l’aisance avec laquelle la population peut collecter des données en ne possédant que des connaissances rudimentaires sur le sujet.
Cette science dite participative présente de nombreux avantages que ce soit d’un point de vue pratique ou théorique. Des projets qui n’auraient pas pu se développer ou même voir le jour faute de moyens sont désormais soutenus et maintenus par des amateur·trice·s (parfois très éclairé·e·s). L’impulsion de départ ainsi que le travail minutieux et souvent long de la collecte des données sur le terrain sont des aspects primordiaux, parfois coûteux en temps et en argent, qui désormais se voient facilités grâce à la participation de citoyen·ne·s enthousiastes et motivé·e·s. La sensibilisation du public aux questions scientifiques en est ainsi renforcée. L’éducation dans ce domaine se fait différemment, de façon plus concrète.
On soulève ici un aspect intéressant du rapport de la société à la science. Cette contribution plurielle peut venir d’associations, de fondations, de musées et autres groupes amateurs et dénote un engagement citoyen marqué.
Science participative, fausse bonne idée ?
L’idée séduit et probablement à raison, mais elle essuie tout de même certaines critiques.
Par exemple, la récolte des données et leur interprétation posent un problème. Qu’en est-il de la fiabilité des résultats, lorsque nous ne pouvons pas garantir la fiabilité de la démarche scientifique de citoyen·ne·s « non formé·e·s » ? Malgré la motivation à produire de bons résultats, il arrive qu’il y ait des erreurs et il devient très compliqué de retracer l’origine de ces erreurs pour des amateur·trice·s.
D’un point de vue général, des questions se posent au sein de la communauté scientifique quant à la qualité des données produites. Et si la fiabilité des résultats est remise en cause, c’est toute l’entreprise qui périclite.
Le rôle des bibliothèques
Que viennent donc faire les bibliothèques dans tout cela ? Pour comprendre le lien entre les bibliothèques et la Citizen Science, il faut faire un petit point sur la situation actuelle des bibliothèques de lecture publique. Celles-ci tentent de se défaire de leur image austère d’institutions dédiées uniquement au livre et travaillent à offrir des prestations diverses qui sortent de leur cadre historique. L’une des missions chères à ces bibliothèques, qui nous le rappelons est un service public, est d’encourager l’éducation et l’engagement civique. Elles jouent un rôle important dans la promotion de la vie citoyenne. La science participative partage cet objectif.
Les ressources de vulgarisation scientifique, les accès numériques à toutes sortes de bases de données et de documents scientifiques, sont tant de points d’entrées vers la science en général. Les bibliothèques de lecture publique rendent accessible toute cette information scientifique et ainsi contribuent à la sensibilisation des usagers à la science en général.
Le fait également que les bibliothèques deviennent des espaces de plus en plus communautaires ainsi que l’émergence des « tiers lieux » nous a montré que ces espaces sont porteurs de projets collaboratifs scientifiques entre amateur·trice·s.
Les bibliothèques réunissent en un même endroit l’information scientifique et les citoyen·ne·s et sert de pont entre le monde académique et la communauté, ce qui facilite la participation de toutes les parties. Elles peuvent mettre en valeur les sciences participatives de bien des manières en tant qu’intermédiaires entre citoyen·ne·s, municipalités et scientifiques.
Leur mission d’information et de partage des connaissances décloisonne les sciences qui ne sont plus désormais réservées à une élite, mais accessibles à tou·te·s.
Les activités de médiation chères aux bibliothèques de lecture publique sont également de grandes transmettrices d’informations. Elles valorisent les collections scientifiques, permettent aux citoyen·ne·s de découvrir des sujets presque inaccessibles dans leur vie quotidienne ou tout du moins noyés dans la masse informationnelle d’Internet. Elles mettent également en lien certains acteur·trice·s professionnel·le·s avec la population. De manière plus subtile, elles influent sur l’image de certains domaines scientifiques en communiquant et/ou vulgarisant à leur propos. C’est une manière de rendre la science plus concrète, ce qui permet à plus de monde de s’y intéresser.
Il est également important de noter que de manière plus prosaïque, mais somme toute indispensable, les bibliothèques fournissent un lieu pour ces rencontres. Plus que cela, elles organisent ces rencontres, en font la promotion et s’assurent de porter ces échanges de façon inclusive et participative. Plusieurs guides, dont celui de l’UNESCO, ont d’ailleurs été créés afin d’aider le personnel des bibliothèques à mettre en place ce type d’activités médiatrices.
Si les projets de science participative sont globalement très bien accueillis tant par le monde des bibliothèques de lecture publique que par les citoyen·ne·s, d’autres n’y voient que peu d’intérêt. Il y a un vrai manque de volonté politique de pousser ce type d’initiative. La science est réservée aux professionnel·le·s, un point c’est tout. Le manque de ressources humaines et financières dédiées à ce type de projets est encore trop conséquent.
La science, un futur pour la bibliothèque et vice-versa
En Suisse, de nombreux exemples démontrent que les sciences participatives ont un bel avenir devant elles. Nous pouvons citer la Bibliothèque centrale de Zürich qui propose des projets de transcription de lettres et de ressources historiques. Elle a fait entrer la Citizen Science dans ses objectifs stratégiques. Elle souhaite de la sorte faciliter la collaboration entre professionnel·le·s et amateur·trice·s de la recherche scientifique et faire se rencontrer les publics afin de les amener à collaborer sur différents projets.
La Bibliothèque centrale de Zürich exprime une volonté claire de se positionner comme un intermédiaire en mettant à disposition des ressources et en manifestant son engagement clair dans la médiation entre le monde scientifique professionnel et le monde scientifique amateur.
La Citizen Science tire grandement profit du travail des bibliothèques qui, forcées de se réinventer à l’ère du numérique, profitent également de ce phénomène en multipliant les projets de médiation et en cherchant à devenir « autre chose ».
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Benoît Epron (29 novembre 2023). Les bibliothèques à l’aide de la Citizen Science. Économie du document. Consulté le 12 octobre 2024 à l’adresse https://doi.org/10.58079/beak
Très intéressant de voir comment les bibliothèques s’adaptent à l’ère numérique en embrassant la Citizen Science ! Cet article met en lumière leur rôle vital non seulement en tant que gardiennes du savoir, mais aussi comme plateformes dynamiques pour l’éducation et la participation citoyenne à la science. Elles deviennent des catalyseurs d’un savoir partagé et accessible, prouvant que la science n’est pas confinée aux laboratoires mais fait partie intégrante de la communauté. Un rappel inspirant de l’évolution constante des bibliothèques !
Merci beaucoup pour votre billet de blog !
Le sujet est très intéressant et j’avoue que je ne connaissais pas le terme de Citizen Science avant de lire ce billet.
De mon point de vue, bien que le Citizen Science soit une arme à double tranchant, il est intéressant de pouvoir initier de simples citoyens à la recherche d’information. Il se peut que la source comme l’exactitude des informations ne soient pas de très bonnes qualités au départ. Cependant, l’expérience va nous apprendre à tous comment faire des recherches et à être plus pointilleux, même pour nous les professionnels d’information.
De ce fait, comme vous l’avez mentionné, il est important que les bibliothèques puissent être un intermédiaire entre le monde scientifique et celui des non-scientifiques car elles ont tout le savoir nécessaire pour lier les deux mondes.
Merci pour ce billet de blog très instructif.
Je pense que les Citizen Sciences ont beaucoup à offrir à la recherche scientifique et que les bibliothèques ont en effet un rôle de médiation important à jouer.
Il est vrai que la question de la fiabilité des données récoltées par les citoyen·ne·s non-formé·e·s doit être interrogée et cela doit être pris en compte lors de l’analyse et l’interprétation des résultats. Cependant, comme cela a été relevé par d’autres commentaires, la diversité et la non-orthodoxie des méthodes de récolte des données peuvent amener des résultats inattendus.
Pour moi, la science citoyenne est une arme à double tranchant.
Dans un sens, elle est excellente car elle peut promouvoir la culture scientifique dans l’ensemble de la population, encourager le partage des données, le crowsourcing et la transparence des données dans le cadre de projets scientifiques à petite ou grande échelle. Elle peut également créer un environnement riche pour le débat scientifique ouvert où les théories peuvent être remises en question, contestées ou même améliorées ou prouvées avec de meilleures preuves ou données. Je pense que la citizen science permet également aux profanes de ne pas être immédiatement rejetés par la communauté scientifique. Trop souvent, les gens supposent qu’un non-scientifique n’a rien à ajouter à un sujet donné. On sait pourtant que, par exemple, en ethnopharmacologie, l’utilisation indigène des plantes médicinales peut être très appréciée, et bien que les guérisseurs dans certaines cultures ne soient pas des scientifiques, ils peuvent apporter de nombreuses contributions à la création de nouveaux médicaments, par exemple. La science citoyenne peut nous éloigner des façons eurocentriques ou ethnocentriques de faire de la science, en permettant à d’autres épistémologies d’y participer.
Cependant, le revers de la médaille est que tous les humains sont enclins à la partialité, y compris les scientifiques. Il peut être difficile pour l’ego d’admettre qu’une théorie à laquelle on a consacré toute sa vie est erronée. La science citoyenne peut également en être victime, lorsque l’idéologie ou les tendances peuvent s’emparer d’une population et créer un contexte où l’on peut, sans même le savoir, créer de la pseudo-science basée sur l’effort inconscient de prouver que l’on a raison sur des croyances inflexibles.
Les bibliothèques, en tant que troisième lieu, peuvent être un terrain intéressant pour recruter des personnes pour faire de la science, il y a tellement de projets, par exemple Mission Monarch (https://espacepourlavie.ca/mission-monarque) au Québec, où les citoyens sont encouragés à regarder l’asclépiade, où les papillons pondent leurs œufs, et à la cartographier sur une application. Les bibliothèques disposent également des fablabs, qui pourraient être un espace intéressant pour la création d’applications permettant de recueillir des données à très grande échelle. Les bibliothèques ont également le devoir de contribuer à l’amélioration de la littéracie, je crois donc définitivement que les bibliothèques sont un lieu fructueux pour la science citoyenne, mais il faut toujours être conscient de la possibilité de partialité exclusive.
Bonjour,
Merci pour cet article intéressant et intuitif !
J’ai appris beaucoup de choses sur la Citizen Science, un terme dont j’avais entendu parlé mais dont je ne connaissais pas vraiment les aspects.
En lisant ce texte, je constate beaucoup d’avantages à faire participer le publics dans les différents projets et cela devient intéressant pour enrichir les recherches.
La Citizen Science comporte également des risques de créer une information légèrement biaisée mais avec l’expérience et l’évolution du concept, je ne doute pas que les progrès se feront de plus en plus en terme de fiabilité de l’information.
C’est un concept intéressant pour les bibliothèques, sachant qu’elles sont pour la participation des usagers dans les projets et animations.
Bien à vous,
Nazmun
Je suis d’accord sur le fait que sur Internet il y ait une masse d’information et que parfois, c’est difficile de s’y retrouver. Par exemple, il m’arrive d’aller sur Internet pour rechercher des contenus liés à la psychologie et de ne pas savoir si je peux me fier aux informations ou non. Je pense que toutes les bibliothèques devrait intégrer la Citizen Science en leur sein.
Il est intéressant d’entendre vos questionnements sur la fiabilité des résultats issus la Citizen Science mais d’après ma compréhension du sujet, les projets lancés sont tout se même chapeautés par des personnes dont c’est le domaine de spécialité (en fonction des projets). Dans les cas que nous avons pu observer, en tout cas, il apparait que la participation de citoyen.ne.s permette à des projets de subsister car la récolte de données sans ces personnes n’aurait pas pu se faire, faute de personnel et de temps à consacrer à ces projets. Dans ces cas là il me semble intéressant de faire appel à des non-professionnel.le.s, et les risques dont vous parlez semblent peu vraisemblables. Pour la Bibliothèque centrale de Zürich par exemple, les projets proposés ne pourraient se faire sans “bénévoles” pour donner de leur temps.
Il faudrait approfondir le sujet concernant d’autres domaines, peut-être plus sensibles, pour voir les risques réels. Mais je doute que des projets de Citizen Science en physique nucléaire existent.
Le questionnement sur la fiabilité des résultats est tout à fait légitime, mais je te rejoins Etienne, quand tu dis que les projets sont tout de même supervisés par des spécialistes. A mon sens, toute étude menée par des scientifiques doit déjà prendre en compte des potentiels biais dans leurs résultats, quelque soit la manière dont les résultats sont cueillis.
Enfin, pour être optimal, je pense que la citizen science doit reposer sur une bonne communication et une méthodologie sans ambigüités entre les chercheurs et les personnes souhaitant leur venir en aide.
Un petit souvenir du travail en Open Data que j’ai réalisé sur le GBIF (Global Biodiversity Information Facility ). C’est hyper enrichissant par exemple que les particuliers envoient leur observation de la biodiversité de leur jardin (ou comme BirdLife qui proposent aux membres d’observer les oiseaux près de chez eux)
Bien sûr, il y a un risque d’erreur plus élevée (mais pas forcément) mais inclure les citoyens dans la recherche et les observations les incitent aussi à davantage se former sur le sujet, à communiquer activement. Les citoyens peuvent être un outil de veille formidable en cela qu’ils multiplient l’angle de vue dans divers lieux géographiques. Si les données qui en ressortent sont particulièrement intéressantes, les experts iront ensuite observer en personne.
La bibliothèque doit avoir ce rôle de former le citoyen qui le désire sur ces divers sujets de recherche et pourquoi pas communiquer afin d’obtenir davantage de participants.
Je ne vois pas dans votre post, le concept d’intelligence collective. Est-ce que cela fait partie de la Citizen Science ?
Je suis d’accord sur le fait que sur Internet il y ait une masse d’information et que parfois, c’est difficile de s’y retrouver. Par exemple, il m’arrive d’aller sur Internet pour rechercher des contenus liés à la psychologie et de ne pas savoir si je peux me fier aux informations ou non.
Je pense que toutes les bibliothèques devrait intégrer la Citizen Science en leur sein.
Je vous remercie pour ce billet de blog très intéressant et très agréable à lire! Je ne connaissais pas le concept de Citizen Science avant de lire votre billet, mais je suis ravie de mieux comprendre de quoi il s’agit grâce à vous.
J’ai toutefois été surprise par ce passage: “Les projets concernés sont très variés, cependant plus nombreux dans les branches des sciences naturelles. Cela est dû à l’aisance avec laquelle la population peut collecter des données en ne possédant que des connaissances rudimentaires sur le sujet.” J’ai été surprise que ce soit dans le domaine des sciences naturelles que la citizen science prédomine, car, à mon sens, il est plus facile de se renseigner dans le domaine de la psychologie (qui ne fait pas partie des sciences naturelles) qu’en physique nucléaire (étant donné le caractère peut-être plus “abordable” de la psychologie, dans le sens où on arrive mieux à se représenter à première vue en quoi consiste la psychologie par rapport à la physique nucléaire).
Je suis par ailleurs contente que les bibliothèques encouragent ce genre de démarche, car cela peut contribuer à faire avancer la science en apportant un autre regard sur celle-ci.
Cependant, comme mentionné dans votre billet de blog, il y a également certains risques à cette démarche et peut-être que certains domaines sont plus sensibles que d’autres (par exemple je ne me baserais pas uniquement sur les découvertes en physique nucléaire d’un-e citoyen-ne lambda pour les appliquer dans des centrales nucléaires, vu les risques que cela représente).
En revanche, je serai plus incline à écouter en psychologie le retour d’une personne ayant un trouble (voulant montrer aux scientifiques une stratégie d’adaptation qu’elle a mise en place et qui fonctionne pour elle).
En conclusion, je pense que les citizen sciences ont un potentiel qu’il faudrait promouvoir, mais sans pour autant ignorer le fact-checking par les scientifiques lorsqu’ils/elles reçoivent les informations desdit-es amataeur-trices.
Merci pour ton commentaire que je trouve très pertinent. La raison pour laquelle la citizen science est plus répandue dans les sciences naturelles est la facilité d’accès pour la récolte des données (selon les sujets, bien sûr). En effet, concernant le nucléaire cela peut s’avérer compliqué, bien que récolter un peu d’eau d’une rivière où des déchets nucléaires ont été rejetés peut être plutôt accessible. Il est facile par exemple de demander à plusieurs personne d’aller observer tel oiseau dans plusieurs endroits simultanément et de noter des informations prédéfinies.
C’est le côté pragmatique qui est mis en avant ici par cette démarche.
Concernant d’autres domaines comme la psychologie, il est possible que l’aspect plus abstrait et subjectif soit un frein dans la récolte des résultats pour les chercheurs et chercheuses. Il est peut-être plus difficile de prouver la légitimité des données, à défaut de l’exactitude des sciences naturelles.
Bonjour à vous quatre !
Tout d’abord, bravo et merci pour votre billet, stimulant et bien rédigé. J’avoue que je ne connaissais pas du tout le concept de « Citizen Science » ; grâce à vous c’est chose faite.
Je suis cependant partagé face à ce genre d’initiative. D’un côté, comme vous l’expliquez, les sciences participatives permettent notamment de sensibiliser le grand public à la science et de mener à bien des projets. Mais d’un autre côté, la Citizen Science comporte des risques bien réels, particulièrement en termes de qualité et de fiabilité des données, ainsi que le mentionne votre billet. Or, c’est de mon point de vue un problème majeur, dans la mesure où la science, si elle s’est certes construite et progresse aussi « grâce » à des erreurs – l’histoire nous en fournit à cet égard de nombreux exemples –, brasse à mes yeux des enjeux trop importants pour qu’elle soit « manipulée » par des mains non expertes.
En effet et toujours d’après moi, la science est avant tout l’affaire des scientifiques, lesquels œuvrent pour le genre humain, et non l’affaire des citoyens, même s’ils sont éclairés et animés des meilleures intentions. Car en permettant que des amateurs ou des profanes (c’est-à-dire des personnes dont la science n’est pas la profession mais constitue un centre d’intérêt) apportent leur pierre à l’édifice de la science, ne risque-t-on pas à terme d’aboutir à une demi-science, à une science au rabais ? Comment s’assurer que le savoir des scientifiques, fruit de longs efforts et de multiples expériences, ne sera pas un jour contesté par les connaissances ou les opinions des non-spécialistes ? Qui nous dit que ces derniers ne désireront pas entrer en concurrence avec les scientifiques de métier ? Et que dire alors des individus malveillants, qui fausseraient volontairement certaines données (on en revient à la question de leur fiabilité et de leur qualité) pour le compte d’une organisation criminelle, voire d’un État ?
Par ailleurs, si je vous lis bien, le contexte en Suisse est favorable au développement et à l’essor des sciences participatives – vous citez l’exemple de la Bibliothèque centrale de Zürich. Auriez-vous d’autres exemples qui seraient de nature à conforter votre propos ? Et puisque vous semblez parfaitement maîtriser votre sujet, sauriez-vous me dire ce qu’il en est de la Citizen Science en Amérique du Sud ?
Amicalement,
Federico
[Je laisse le soin à mes petits camarades de répondre à ta première question concernant les exemples 😉 ]
Concernant la situation en Amérique du Sud, il semblerait que le contexte est plutôt propices aux Citizen Sciences (Ciencias ciudadanas ou Ciencia abierta) comme le mentionne cet article de blog : https://blogs.iadb.org/conocimiento-abierto/es/el-estatus-ciencia-abierta-americalatina/
(Le blog en lui-même a d’ailleurs l’air passablement intéressant même si je n’ai actuellement pas le loisir de le détailler).
Il renvoie notamment vers cet ouvrage daté de 2020, concernant la politique scientifique et les sciences “ouvertes” : https://biblioteca.clacso.edu.ar/clacso/se/20201120010908/Ciencia-Abierta.pdf
De nouveau, c’est un peu long pour avoir eu le temps de tout lire, mais ça semble assez intéressant et il y a une petite vingtaine de références si d’aventure tu souhaites creuser le sujet 🙂
J’espère que ça te convient comme réponse et merci pour ton commentaire !
Bonjour Amandine,
Merci beaucoup pour ta réponse et les références, je n’en demandais pas tant ! Cela me permettra d’approfondir ce sujet et de lire à nouveau des textes en espagnol, chose que je n’ai pas faite depuis un certain temps ^^
Bien à toi,
Federico
J’avoue que je ne connaissais pas le sujet, j’ai eu alors plusieurs questionnements : je me suis d’abord dit “chouette ! peut-être un moyen d’avoir de la science faite par des minorités, qui n’ont pas eu les mêmes opportunités de carrières” mais visiblement, ce n’est même pas le cas, puisque selon cet article, on y retrouve quand même une grande part d’hommes blancs aisés. (https://www.sei.org/features/why-do-people-take-part-in-citizen-science/). Et que c’est même une manière de booster sa carrière. J’ai également peur que ce soit finalement de l’exploitation, car même si la recherche est une cause noble, on pourrait payer ces gens, c’est un métier.
J’ai également parcouru ce guide, surtout les pages 34 à 40 (https://hal.inrae.fr/hal-02801940/document), qui donne des statistiques et des conseils pour mener à bien un projet de sciences citoyennes. Je trouve intéressant de se demander à qui appartiennent les résultats de la recherche, puisque les citoyen.ne.s impliqué.e.s ne sont pas nommé.e.s de la même manière que les scientifiques.
Bref, j’ai eu du plaisir à découvrir ce qu’étaient les citizen sciences, mais ai des doutes quant à la réalisation concrète des études.